vendredi 28 juin 2013

ATU 2 : comme si vous y étiez !

Compte rendu du deuxième Atelier de travail urbain (ATU)


sur le projet « Village Oxylane »


Où l'on apprend que la vocation agricole du site est viable, mais qu'en bétonnant ces terres, « on lutte contre l'étalement urbain » (sic), que la mairie a choisi un mode de révision du PLU « allégé » pour aller plus vite et qu'en démocratie « représentative », on se tait ou on se présente à des élections.

Mardi 25 juin, 20h, salle Jean Baptiste Clément, Saint-Jean de Braye.

Pour ce deuxième ATU, on nous avait promis le Zénith ! Mais cette fois-ci, seule une soixantaine de chaises était installée. Il faut dire que la mairie avait fait preuve d'une inhabituelle discrétion: rien dans le magazine de la commune, une petite annonce sur le site de la mairie le jour même et encore ! avec un horaire erroné, et quelques invitations envoyées aux riverains...

L'adjoint à l'urbanisme commence par s'excuser du cafouillage dans les horaires. Le prochain ATU aura lieu le 1er octobre, à 20h30. Au Zénith ? Il n'en est visiblement plus question...

Nous découvrons le calendrier lié à ce projet :

Septembre 2013 : réunion d’examen conjoint avec les personnes publiques associées (Etat…) et validation du dossier de mise en compatibilité

Octobre 2013 : atelier de travail urbain avec présentation du dossier du Plan Local d'Urbanisme (PLU)

Novembre 2013 : enquête publique et ajustement du dossier de mise en compatibilité

Décembre 2013 : éventuellement Atelier de travail urbain avec le retour du commissaire enquêteur

Janvier 2014 : délibération du conseil municipal approuvant le dossier de mise en compatibilité du PLU avec vote

L'ordre du jour pour la réunion de ce soir portera sur le PLU: orientation, aménagement, programmation. Mme Hubert, du cabinet du même nom, a été missionnée par la mairie pour élaborer un projet de modification du PLU, qu'elle va nous exposer.

Celle-ci nous explique que le PLU doit évoluer pour cadrer le projet VOX (diminutif employé par la mairie pour « Village Oxylane »). Elle rappelle les relations complexes entre PLU, Schéma de Cohérence Territoriale (SCoT), Document d'Aménagement Commercial (DAC). Tous ces documents évoluent en interaction. Le choix de la municipalité est de modifier le PLU par l’intermédiaire d’une déclaration de projet. Cette procédure permet de modifier uniquement la zone concernée par le projet Oxylane (ce qui exclut les riverains qui voudraient profiter de cette modification pour construire sur leurs terres). Cette procédure présente également l’avantage, pour une municipalité pressée, d’accélérer les échéances : 6 mois suffiraient là où une révision complète du PLU prendrait environ 4 ans.

Mme Hubert nous présente une série de cartes détaillées du site de la Bissonnerie avec l’analyse initiale du quartier : cours d’eau, hauteur des bâtiments, sentes et voies de circulation, zones d’habitat, coulée verte, activité agricole. L’intégration du projet « VOX » dans ce quartier va permettre, explique-t-elle, de « développer, dans une vision de cohérence, un nouveau morceau de ville. »

Le diagnostic précis réalisé par les écologues de ce cabinet montre bien que ce quartier a conservé une vocation agricole préservée du bétonnage à outrance. L’exploitation agricole est viable pour un modèle céréalier même si cela demande un traitement particulier. L'agriculteur qui cultive des parcelles sur ce site et qui souhaite continuer à le faire (lire son témoignage sur le tract distribué ce soir là par SPLF 45) opine du chef. Lorsque nous posons la question de l'artificialisation des terres, alors que le Loiret a perdu un peu plus de 15 000 hectares de terres agricoles en 10 ans de 2000 à 2010 (La publique du Centre, M. Villeroy, 16/01/2013), l'élu répond : « Je suis tout à fait d'accord avec vous, il faut arrêter l'étalement urbain, il faut concentrer. D'ailleurs ce projet lutte contre l'étalement urbain  ».(sic)

Nous avons évoqué ensuite l’inauguration d'une zone agricole protégée à Chécy, la commune voisine, sur une surface de 284 hectares, la semaine précédente. Les représentants de l’Etat, ce jour là, ont tous parlé de stopper l’étalement urbain, de réfléchir à la biodiversité, à la disparition du foncier agricole. Pourquoi tenir là un tel discours et s’osbstiner ici à faire le contraire en voulant implanter une n-ième zone commerciale inutile ?

Les adjoints au développement durable et aux finances (M. Ronceray EELV !, M.Lavialle) nous réexpliquent que « cette zone est destinée à être urbanisée depuis longtemps et que le choix du projet VOX se fait en relation avec l’AgglO et la commune. De plus, la ville a acheté 5 hectares pour y implanter un maraîcher bio, et qu’il est très difficile de trouver des agriculteurs pour s’installer » ; notre collectif, avec Terre de liens Centre, propose pourtant une alternative agricole, et deux agriculteurs cultivent encore les terres. Une photo du champ actuellement cultivé est d’ailleurs présentée aux participants à l’ATU…Et même si ce sont des terres de qualité moyenne, leur culture est une réalité !

Puis nous avons interpellé l'élu à l'urbanisme sur les 240 emplois promis, en citant l'article des Échos du 3 avril 2013 où le directeur général de Décathlon reconnaît que l'enseigne a ouvert 5 nouveaux magasins en 2012 à effectif constant. La réponse de l'élu est toujours aussi embarrassée: «  D'abord il n'y aura pas que Décathlon. En première phase ils ont annoncé la création de 100 emplois, plus 40 indirects, et dans la seconde phase, avec les « entités partenaires », encore 100 emplois. Mais Décathlon est incapable de dire si ce seront des CDI et combien d’emplois seront créés. Ils se basent sur leurs autres sites. » Et nous sommes priés de les croire!

C'est le tour de la question rituelle: « Pourquoi avoir cédé les terrains à un prix si bas, 2,40 € le m² ? » Réponse  de l'élu : « Parce que c'est le prix fixé par les Domaines, qu'on n'a pas le choix, à peine une marge de 10% maxi, je peux vous montrer les textes dans mon bureau si vous le souhaitez ! » Oui, nous sommes demandeurs d'avoir les précisions juridiques nécessaires sur ce point.




Mme Hubert reprend son exposé. On y voit le futur site repeint en vert :  végétalisation et paysagement soigné des aires de stationnement pour éviter l'effet « nappe » de parking, bande paysagère, merlons, espace vert, écran végétal, tout pour « diminuer les nuisances depuis les hameaux »... Elle nous explique même que l’arrivée d’Oxylane protégera les riverains des nuisances sonores de la tangentielle, ce qui nous fait bondir : une bande naturelle verte fait déjà office de zone tampon et est efficace actuellement. Quand celle-ci sera détruite, nous ne pouvons croire que le bâti de commerces Décathlon et Compagnie sera une protection efficace, sans compter les nuisances supplémentaires (1 million de visiteurs et des animations quotidiennes) ! Il est également question de « circulation douce sécurisée », d'assurer les connexions piétonnes avec les sentiers existants, de créer un futur transport en commun en site propre (qui va payer ?) ... Si le site est clôturé, comment assurer cette circulation à vélo ? Et n'oublions pas qu'Oxylane a une zone de chalandise allant jusqu’à 1h30 ! Or dans un article intitulé « L’agglo a besoin de respirer » (La République du Centre, 20/02/2013), on apprend que l’Agence Régionale Sanitaire préconise de limiter le trafic routier sur l’Agglo pour baisser la quantité de toxiques dans l’air. Ces polluants ont en effet été reconnus par l’Institut National de Veille Sanitaire comme facteurs de cancers, d’infertilité et encore plus dangereux pour les personnes fragiles comme les enfants, les asthmatiques et les seniors. La pollution due au trafic routier engendré par ce nouveau centre commercial accentuera une fois encore la mauvaise qualité de l’air de notre agglomération ! Arrêtons donc de nous faire croire qu’un Village Oxylane est un projet de développement durable !

Et puis il va falloir réfléchir à préserver les employés du site du bruit de la tangentielle, et le bâtiment devra respecter des normes de basse consommation. « Mais s’ils ne respectent pas tout ça ? ». L'adjoint répond de manière ferme : « On leur demande de le faire et s'ils refusent, on le fait à leur place et on leur envoie la facture. »

L'autre question rituelle: « Qui va payer le rond-point ? » n'obtient pas la même réponse que lors du premier ATU. « Oxylane va payer des impôts très chers, la taxe d'aménagement, et c'est cette taxe qui va intégralement payer le rond-point. » Au dernier ATU c'était à hauteur de 90%...

Les élus imaginent ensuite avec enthousiasme les courses comme « les Petites Foulées Abraysiennes », organisées chaque années par la mairie, ou le cross UNSS (regroupant les scolaires) avec un départ donné depuis le parking du Décathlon... Ces courses se déroulent pour le moment dans la ville ou dans la forêt... Pourquoi vouloir changer ? Réponse : « Parce que c'est ce qui se fait dans les autres Oxylane. » On peut néanmoins se poser la question du sens… 

Vient alors une interrogation plus générale destinée à l'adjoint aux finances qui, lors des ateliers « ville jardin, ville durable », avait réfléchi sur la responsabilité sociale des entreprises. Or, Oxylane est détenu par l'Association Familiale Mulliez à hauteur de 51 %, et par la famille du fondateur Michel Leclercq (49%), que l'on retrouve parmi les exilés fiscaux à Néchin en Belgique. Alors, après l'affaire Cahuzac, le soutien sans faille de la municipalité au groupe Oxylane pourrait-être interprété comme un soutien à ces pratiques ? L'élu admet que la réflexion sur comment promouvoir à l'échelle d'une commune l'économie sociale et solidaire n'est pas aboutie. La rédaction d'une charte qui n'aura pas force d'opposition est en court. Il regrette comme nous que la famille Mulliez soit un groupe familial. « Mais voilà. On a pris la décision depuis 20 ans, 30 ans d'urbaniser cette zone, et cela a été réaffirmé dans le SCoT de 2008. Alors soit c'est la commune qui aménage et ça coûte très cher, soit c'est un opérateur privé et ça ne coûte rien. Nous faisons remarquer que la zone pourrait aussi rester en l’état...

Le débat se termine. Nous offrons notre panneau « 1001 signatures contre Oxylane » à l'adjoint à l'urbanisme.

Le prochain ATU aura lieu le 1er octobre 20h30 salle JB Clément, en présence de Mme Hubert et ce sera pour parler de réglementation pure et dure. L'adjoint à l'urbanisme s'engage à nous fournir les documents de travail en amont de l'ATU (8 jours avant).

Dans les échanges informels de l'après ATU, nous lui demandons pourquoi la mairie refuse à notre association tous les services proposés par la maison de la vie associative (domiciliation, prêt de matériel, reprographie, stand au forum des associations, inscription dans le guide des associations...), qu'elle accepte pour d'autres associations de défense de l'environnement comme « Défense contre les nuisances industrielles ». Il nous répond que c'est parce que jusque-là les réservations des salles où nous nous réunissions étaient faites pour le compte d'une association qui a le mot « politique »  dans ses statuts. Certes, mais que l'adjoint nous explique comment réserver une salle pour créer un collectif sans assurance ? Notre association n'est liée à aucun parti politique, et elle est composée de personnes de différentes sensibilités ! Le débat tourne ensuite autour du mot démocratie. Pour notre élu, nous sommes dans une démocratie représentative : on est élu sur un programme, (une dame remarque qu’Oxylane n'a jamais figuré à leur programme!), on le met en place, et ceux qui ne sont pas d'accord n'ont qu'à se présenter à l'élection suivante... Et l'expression de points de vue divergents, l'analyse, l'arbitrage des contradictions ? NON ! « On est sûr que c'est un bon projet pour la ville et pour l'AgglO. » Circulez, y'a rien à débattre !

A quel moment la mairie a-t-elle laissé aux habitants un espace pour échanger sur le bien fondé de ce projet ? Jamais ! C'est pourquoi nous interviendrons encore sur le fond de ce dossier, pour mettre en avant le manque de justifications crédibles (cf l'enquête publique du DAC) pour ce projet et l'urgence de sauvegarder nos terres agricoles péri-urbaines.




1 On connaissait le MOX, combustible nucléaire fabriqué à partir de combustibles irradiés, mais le VOX est aussi pour nous à ranger dans la catégorie des produits dangereux, en tant qu'aménagement urbain très destructeur de foncier agricole !


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