mardi 19 mai 2015

Oxylane : où en est-on ?

Tout commença en novembre 2011 quand la mairie organisa une réunion publique pour présenter un projet de création de zone commerciale baptisée « Village Oxylane », à Saint Jean de Braye dans l’agglomération d’Orléans (Loiret, 45).

Cette annonce fit réagir un certain nombre d’Abraysiens, pour aboutir en décembre 2012 à la création du collectif « pour un Site Préservé entre Loire et Forêt », faisant référence au slogan de la ville elle-même « La ville qui bouge entre Loire et forêt ». Slogan bien ancré dans son époque où l’agitation perpétuelle est érigée en valeur.


Chemin faisant, réunions publiques après réunions de travail et inversement, le collectif se constitue en association en mai 2013, fort de son effectif grandissant et afin de se doter d’une structure pour mener le combat en justice et poursuivre la mobilisation.


Un « Village Oxylane » : pour qui ? pour quoi ? et pour quels impacts ?
 

Les « Villages Oxylanes » sont un concept créé par le groupe Decathlon, détenu par la famille Mulliez, propriétaire du groupe Auchan et de plusieurs dizaines d’enseignes de la grande distribution en France et dans le monde. En France, le groupe Mulliez possède 4600 hypermarchés et supermarchés, et 2440 dans le monde (données 2009).

Le magazine économique « Capital » estimait en 2014 que la famille Mulliez constituait la première fortune de France, avec un portefeuille global garni de 37,88 milliards d’euros (+ 3,8 % par rapport au printemps 2013). La famille est également connue pour être l’une des championnes de l’optimisation et de l’évasion fiscales.

Pour conforter sa position dominante sur le marché orléanais de l'article de sport, Decathlon France ambitionne de créer chez nous un magasin supplémentaire (il y en a déjà deux au sud de l’agglomération), autour duquel viendraient se greffer plusieurs autres magasins du groupe Auchan, plus ou moins liés aux domaines du sport et des loisirs de plein air. Cette entreprise de bétonnage et d’artificialisation des sols est maquillée en opération de promotion du sport et des loisirs de plein air.

L’agglomération d’Orléans dispose déjà d’une offre pléthorique de magasins de sport, avec de nombreuses petites surfaces souvent spécialisées, et plusieurs grandes surfaces généralistes comme Decathlon, réparties aux 4 points cardinaux du territoire. Nous ne sommes donc pas confrontés à un implantation répondant à une demande locale.

Il est donc assez cocasse devant cet état des lieux que l’argument massue du groupe Decathlon pour convaincre la ville d’accepter cette implantation, est la création de, nous dit-on, 240 emplois ! Et pour combien de suppression à travers la fermeture d’autres enseignes déjà présentes ? On apprenait dans Les Echos qu’en 2012, malgré 5 ouvertures supplémentaires, le groupe Decathlon ne créerait aucun emploi, gains de productivité obligent.

Ce qui n’empêche pas  la mairie de Saint Jean de Braye de voter une déclaration « d’intérêt général » en faveur le projet Oxylane dans une délibération du 14 février 2014. Quand bien-même il s’agit de toute évidence d’un projet d’intérêt privé, qui sape la prospérité collective et notre patrimoine.

La mairie et l’agglomération d’Orléans ont d’ailleurs signé une promesse de vente au prix imbattable de 2,40 euros le m2 ! A titre de comparaison, pour le village Oxylane de Lesquin dans le Nord, ouvert en 2011 et fermé en 2014, Decathlon avait acquis les terrains à 30 euros le m2.
Non content de participer à l’artificialisation des sols à travers son soutien à la grande distribution, nos collectivités locales décident en plus de brader le bien public.

Car que ce soient en termes économiques ou écologiques, ce projet a pour but de créer de la valeur (pour les Mulliez) en détruisant de la richesse (économie locale et patrimoine naturel). En effet, si pour Decathlon et ses supporters la zone convoitée de 16,5 Ha n’est pas une zone agricole (selon les documents d’urbanisme modifiés en faveur du projet), ce n’est en revanche pas l’avis de l’un des agriculteurs qui la cultive. Il suffit pourtant de mettre un pied sur le site et constater entre les hectares boisés et les champs cultivés qui, du PLU ou de l’agriculteur, est le plus proche de la réalité.


Selon l’étude d’impact sur l’environnement de Decathlon, le site serait composé de 8,87 Ha de zones humides dont seulement 0,15 ha devraient être compensés écologiquement! En totale contradiction avec la loi sur l’eau, Decathlon propose donc une destruction nette de plus de 8 Ha d’un écosystème indispensable ! En effet, selon l’avis de plusieurs spécialistes des sols, cette zone permet entre autres d’atténuer les fortes précipitations et de filtrer (un peu) les pollutions issues de la 4 voies avoisinante avant que les eaux ne finissent dans la Loire (patrimoine mondial de l’Unesco) en empruntant la Bionne, un de ses affluents.

Où en est-on au printemps 2015 ?

 
Nous avons organisé de nombreux évènements d’information citoyenne : déjeuners sur l'herbe, plantations, Courge party, projections-débats, conférences, marche de Roubaix à Néchin , nous ne manquons pas d’imagination pour faire connaître ce projet dans l’opinion public et démontrer à nos élus l’inanité de celui-ci.

Nous avons lancé plusieurs recours en justice. Un premier sur la modification du Plan Local d’Urbanisme et la déclaration d’intérêt général du projet. Le second sur l’autorisation de création d’une surface commerciale donnée par la Commission Départementale d’Aménagement Commercial (CDAC). La Commission Nationale d’Aménagement Commercial (CNAC) a accepté notre requête le 12 novembre 2015 en annulant l’autorisation d’exploiter de Decathlon. Qui plus est, les raisons invoquées pour motiver cette annulation reprennent tous nos arguments principaux ! Si on était de mauvaise foi, on pourrait croire que les experts en environnement et en bon sens se cachent plutôt du côté de la société civile que de celui des élus politiques et des experts rémunérés par Decathlon.

Comme on pouvait s’y attendre, Decathlon a décidé de faire appel de cette décision. Nous poursuivrons donc notre action en justice. Nous avons également déposé un recours devant le tribunal administratif pour contester le permis d’aménager délivré comme si de rien n’était par la commune en décembre 2014…


Nous sommes déterminés à ce que le site de la Bissonnerie (c’est son petit nom) conserve sa vocation agricole et naturelle !
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